Journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation

du dimanche 27 avril 2025

La cérémonie commémorative organisée à l’occasion de la journée du souvenir des victimes de la déportation s’est déroulée au Monument aux Morts, dimanche 27 avril à 11h, en présence du Maire de Bischwiller Jean-Lucien Netzer et de la Conseillère d’Alsace du canton de Bischwiller Christelle Isselé.

Discours de Jean-Lucien Netzer, Maire de Bischwiller

Aujourd’hui en ce dernier dimanche d’avril, nous nous retrouvons comme chaque année pour nous souvenir de ces hommes et de ces femmes qui ne s’étaient rendu coupable d’aucun crime, qui n’aspiraient qu’à vivre en paix, libres de leur foi, libre de leurs sentiments, reconnus malgré leur handicap, respectés dans leurs vies sentimentales. Ceux qui faisaient honneur à la dignité de l’homme, étaient menacés du même traitement. Arrêtés, emprisonnés, souvent torturés, convoyés tel le bétail vers les camps de travail, de concentration ou d’extermination.

Restée longtemps ignorée, c’est cette horreur, que les armées alliées allaient découvrir, en ouvrant les portes de ces camps, outils de la barbarie nazie.

Horreur que le régime Nazi avait perpétré au nom d’une idéologie inacceptable.

Nous sommes réunis ce matin pour leur rendre hommage. Et le meilleur hommage que nous puissions leur rendre est de ne pas oublier leur souffrance, leur terreur, les humiliations.

Ne pas oublier tous ceux qui dans ce contexte de haine ont su préserver la dignité humaine.

Ne pas oublier non plus comment cette barbarie sur fond de crise économique, sociale et politique a pu s’installer dans une Europe pourtant civilisée.

C’est une réalité qui doit nous faire réfléchir. Réfléchir, sur les causes qui ont engendré l’inconcevable, l’impensable.

Notre émotion est saisie par l’horreur des situations découvertes dans les camps, toutefois il est essentiel de nous rappeler les causes qui aboutirent à ce déni d’humanité.

La défaite de l’Allemagne et les réparations de guerre infligées ne pouvaient que plonger ce pays dans des crises économique et sociale sans précédents avec son cortège de malheurs et de désolations, chômage, hyperinflation et misère. La perte de confiance dans un avenir meilleur constitua le ferment de la montée de l’idéologie et l’allégeance à un despote mégalomaniaque dans l’esprit duquel allait germer le scénario de l’horreur finale.

Le parallélisme des situations suscite notre inquiétude.

L’époque que nous vivons est marquée par une crise économique très grave, une crise qui voit les inégalités progresser sans cesse et qui se propage dans un climat où la légitimité des instances politiques est plus que jamais mise en cause.

Une époque qui est également marquée par des actes antisémites et racistes en forte augmentation, par des attaques homophobes qui se développent et des discriminations toujours plus nombreuses.

Dès lors, certains trouveront refuge dans le dogmatisme et le sectarisme, souvent religieux, qui les emprisonne progressivement dans une radicalisation. Celle-ci les conduit à des actes aussi barbares que ceux que nous venons d’évoquer, enlèvement, meurtres, attentats terroristes. Toutes formes d’action dont le seul but est de créer la terreur et d’aliéner l’autre.

Face à cette situation, plus que jamais nous devons faire preuve de rigueur morale, d’esprit de responsabilité et ne pas oublier les enseignements de l’histoire.

Car en face de cette radicalisation individuelle qui reste tout de même marginale dans notre pays, il apparaît un danger tout aussi perfide, celui de remettre en cause la démocratie, celui qui consiste à chercher le bouc émissaire, celui qui conduit à rejeter l’autre en raison de sa couleur de peau de son appartenance religieuse de ses habitudes de vie de ses différences culturelles. En résumé tout ce qui fait que l’autre existe et qu’il est différent.

Rejeter cette différence c’est rejeter les principes de la République, la déclaration de Droits de l’Homme. Face aux dérives et à leurs dangers, le chemin est connu, c’est LA République, notre République laïque, celle qui respecte chaque être dans et pour ce qu’il est. Celle qui reconnaît que les différences, culturelles, religieuses, d’appréhension de la vie sont sources de richesse et permette à chacun de grandir ; de s’épanouir ; de vivre intensément. Celle qui nous permet de vivre ensemble au-delà de nos différences, celle qui nous réunit avec les mêmes droits et les mêmes devoirs, celle qui privilégie ce qui nous rassemble à ce qui nous sépare. Le hasard du calendrier veut qu’hier a été inhumé Jorge Mario Bergoglio qui avait rédigé en 2020 l’encyclique Fratelli tutti qui peut inspirer chacun dans la conduite de sa vie et de son action dans la société.

La fraternité et l’amitié sociale sont les voies indiquées par le Pape pour construire un monde meilleur, plus juste et plus pacifique, avec l’engagement de tous, peuples et institutions. Il rappelle avec force l’opposition à la guerre et à la mondialisation de l’indifférence.

  • Ne pas rester indifférent au malheur et aux difficultés de notre prochain, construire notre projet personnel, ou commun dans le but de rendre effective la fraternité républicaine ;
  • Nous donner la possibilité de vivre dans un monde ouvert, ne pas construire nos modèles politiques, économiques ou sociaux en considérant que nous faisons tous partie d’une même humanité ;
  • Notre engagement politique doit être porté par la recherche du bien commun, de la construction d’un monde uni, d’une politique où chacun trouve la dignité ;
  • Construire par le dialogue la paix en cicatrisant les blessures. On ne peut pas les oublier au contraire il faut par la commémoration, comme celle d’aujourd’hui, les regarder en conscience pour éviter qu’elle ne se reproduise et les écarter de nos modes de pensée et d’action. Regarder la vérité au fond des yeux pour rétablir et construire un monde de justice et rétablir la paix.

C’est à chacun de nous dans nos responsabilités respectives, en tout endroit de nos vies, qu’elles soient professionnelles, sociales et même familiales de faire vivre la République.

Et ceci en faisant respecter les règles, les lois et l’autorité tout en agissant pour toujours plus de respect, d’égalité et de solidarité

Liberté, égalité, fraternité depuis plus deux siècles c’est ce triptyque qui soude notre pays, qui lui permet de faire face à toutes les épreuves, c’est encore celui qui doit éclairer notre engagement collectif.

Mesdames et Messieurs, en ce jour où nous nous retrouvons pour commémorer la mémoire de ces femmes, de ces hommes et de ces enfants dont la souffrance n’aura eu d’égale que la barbarie de leurs bourreaux, inspirons nous de leur force, de leur dignité, faisons vivre leur mémoire …

C’est notre devoir collectif, notre devoir envers ces millions de victimes, c’est notre devoir envers les victimes enfants de Bischwiller. C’est aussi un devoir envers les générations futures qui après nous porteront la flamme du vivre ensemble, du respect et de la tolérance.